Toutes les entreprises d’au moins 11 salariés disposent, depuis le 1er janvier 2020, d’un comité social et économique (CSE). Parmi ses différentes missions, cette nouvelle instance de représentation du personnel doit notamment veiller à la bonne application du Code du Travail au sein de l’entreprise. Dans son arsenal législatif, elle dispose d’un droit d’alerte de l’employeur. Découvrez à quoi il correspond et comment il fonctionne.
Le droit d’alerte du CSE est une prérogative héritée du CE. Elle consiste à “alerter” l’employeur sur des faits préoccupants de nature à mettre en péril l’intégrité physique ou morale des salariés ou la pérennité de l’entreprise.
Le caractère urgent des faits dénoncés par le droit d’alerte confère au CSE la possibilité d’exercer ce droit à tout moment et dans les plus brefs délais, sans attendre une réunion du CSE.
Dans quelles situations le CSE peut-il faire valoir son droit d’alerte ?
Le CSE peut exercer son droit d’alerte dans certaines situations prévues par les articles L. 2312-59 et suivants du Code du travail en fonction de l'effectif de l’entreprise.
Dans les entreprises d’au moins 11 salariés, le droit d’alerte du CSE concerne les situations :
- D’atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise.
- De danger grave et imminent en matière de santé publique et d'environnement.
Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le droit d’alerte au CSE est également étendu aux situations :
- D’alerte économique : connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise.
- D’alerte sociale : connaissance de faits susceptibles de caractériser un recours abusif aux contrats de travail à durée déterminée (CDD).
Il est par ailleurs important de souligner que le droit d’alerte du CSE doit être exercé de bonne foi et uniquement lorsque la raison est jugée suffisamment urgente et préoccupante. Le droit d’alerte ne doit, en aucun cas, être utilisé dans l’objectif de nuire à l’entreprise ou un collaborateur. A ce titre, le Code pénal prévoit jusqu’à 5 ans de prison et 45.000 euros d'amende pour la dénonciation d'un fait que l'on sait totalement ou partiellement inexact.
La protection du lanceur d’alerte
Tant que ce droit est exercé de bonne foi, le CSE ne peut en aucun cas être sanctionné pour avoir fait valoir son droit d’alerte. Tout au long de la procédure, les salariés concernés par la situation dénoncée par le CSE peuvent arrêter leurs activités au sein de l’entreprise. Ce droit de retrait du salarié est prévu par les articles L. 4131-1 et suivants du Code du travail.
La procédure de droit d’alerte du CSE
Le CSE peut exercer son droit d’alerte de sa propre initiative ou suite à la demande d’un salarié. La procédure est ensuite très strictement encadrée et diffère en fonction de la situation dénoncée par le CSE.
Les étapes clés pour exercer son droit d'alerte
Le Code du Travail prévoit l’exercice du droit d’alerte du CSE dans quatre cas de figure :
- Atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise ;
- Danger grave et imminent en matière de santé publique et d'environnement ;
- Connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise ;
- Connaissance de faits susceptibles de caractériser un recours abusif aux contrats de travail à durée déterminée (CDD).
Pour chacune de ces situations, une procédure spécifique doit s’appliquer.
Procédure à suivre en cas d’alerte d’atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise
- Alerter l’employeur.
- Procéder à une enquête conjointe avec l’employeur.
- En l’absence d’accord ou de solution, saisir le Conseil des Prud’hommes par le CSE ou le salarié victime.
Dans les faits, l’enquête se matérialise généralement par des entretiens avec les différents protagonistes concernés. L’employeur et les représentants des salariés tirent ensuite des conclusions communes. Si les faits sont avérés, des dispositions pour les faire cesser doivent être prises. Un procès-verbal peut également être rédigé. En l’absence d’accord ou si la responsabilité de l’employeur est directement engagée, le CSE ou le salarié peut saisir le juge du conseil de prud'hommes en référé.
Procédure à suivre en cas de danger grave et imminent en matière de santé publique et d'environnement
- Alerter l’employeur.
- Inscrire un avis dans le registre spécial.
- Procéder à une enquête conjointe avec l’employeur.
- En l’absence d’accord ou solution urgente pour faire cesser le danger, convoquer une réunion d’urgence du CSE dans un délai maximum de 24 heures.
- Invitation, par l’employeur, d’un représentant de la prévention de la caisse régionale d’assurance maladie et de l’inspecteur du travail à la réunion du CSE.
- Formuler un accord entre l’employeur et le CSE sur les mesures à prendre.
- En l’absence d’accord, l’employeur est dans l’obligation de saisir l’inspection du travail.
Cette procédure d’urgence nécessite une grande réactivité de la part du CSE comme de l’employeur. Une solution doit être trouvée dans un délai très court afin de faire cesser le danger. Par ailleurs, l’alerte est consignée dans un registre spécial où sont indiqués les éléments clés (date, lieu,...) et notamment les produits ou procédés de fabrication utilisés et dont le CSE estime qu'ils présentent un risque grave pour la santé publique ou l'environnement.
Procédure en cas d’alerte économique
Le droit d’alerte économique s’applique uniquement aux CSE des entreprises d’au moins 50 salariés et concerne la connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entreprise.
- Demander à l’employeur des explications sur les faits considérés comme préoccupants.
- Inscrire cette demande à l’ordre du jour de la prochaine réunion du CSE.
- Suite à la réunion, en l’absence d’accord ou si le caractère préoccupant de la situation est confirmé, le CSE établit un rapport.
- Transmettre le rapport au commissaire aux comptes.
- Vote au sein du CSE sur la nécessité de saisir l’organe en charge de l’administration ou de la surveillance ou, à défaut de leur existence, informer les membres des groupements d’intérêt économique (GIP) et/ou les associés de l’entreprise.
Suite à la demande d’explications du CSE, l'employeur peut saisir le juge du conseil de prud'hommes afin d'annuler une procédure d'alerte qu'il l'estime abusive. Lors de la réunion du CSE, ce dernier peut se faire assister d’un expert comptable ou encore convoquer le commissaire aux comptes pour établir son rapport. Ce sont les conclusions du rapport qui permettront de juger de la pertinence d’informer le conseil d'administration ou de surveillance de l’entreprise sur les faits jugés préoccupants.
Procédure en cas d’alerte sociale
Le droit d’alerte social s’applique uniquement aux CSE des entreprises d’au moins 50 salariés et concerne la connaissance de faits susceptibles de caractériser un recours abusif aux contrats de travail à durée déterminée.
- Demander des explications à l’employeur à l’occasion de la prochaine réunion du CSE.
- Saisir l’inspection du travail si l’abus est constaté.
- Communiquer à l’employeur le rapport de l’inspection du travail.
- Communication par l’employeur d’un rapport contenant les mesures prévues pour remédier à l’abus constaté.
Pour justifier son recours au CDD et permettre au CSE de se faire un avis éclairé, l'employeur doit lui communiquer le nombre de salariés titulaires d'un CDD et de salariés temporaires ainsi que les raisons qui ont motivé le choix de ce contrat de travail.
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Droit d'alerte et lanceurs d'alerte : quelle est la différence ?
Quelles sont la portée et les limites du droit d’alerte CSE ?
La portée du droit d’alerte CSE s’étend à un large éventail de situations, notamment en cas :
- De danger grave et imminent ou de risque pour la santé ou la sécurité des salariés ;
- D’atteintes aux droits des personnes ;
- De faits susceptibles d’affecter gravement la situation économique de l’entreprise ;
- D’augmentation significative du recours aux contrats précaires.
Mais attention, son utilisation doit être responsable, honnête et transparente :
- Le CSE ne peut pas déclencher une alerte sans motif valable : elle doit reposer sur des faits concrets et vérifiables ;
- Il ne doit pas être utilisé de manière abusive ou dilatoire, pour ne pas bloquer le fonctionnement normal de l’entreprise.
- Le Comité doit suivre les procédures prévues par le Code du travail, variables en fonction du type d’alerte soulevée, pour exercer ce droit.
- L’identité du salarié qui a signalé le problème doit être protégée, sauf s’il consent à la divulguer.
Quelles sont les conséquences d’une alerte CSE pour l’employeur ?
Dès lors que le CSE exerce son droit d’alerte, l’employeur doit immédiatement enquêter conjointement avec le Comité, afin de répondre aux problématiques soulevées. De plus, il a l’obligation légale de prendre des mesures pour remédier à la situation, sous peine de sanctions. En cas de désaccord sur la gravité du danger, le CSE peut saisir l’inspection du travail ou le tribunal des prud’hommes pour obtenir une décision rapide.
Quel est le rôle des organisations syndicales dans l’exercice du droit d’alerte par le CSE ?
Les organisations syndicales apportent une expertise, un soutien logistique, juridique et moral, ainsi qu’une capacité de mobilisation et de médiation. Elles peuvent jouer un rôle déterminant pour que l’exercice du droit d’alerte par le CSE soit efficace, respectueux des procédures et protecteur des intérêts des salariés.
Comment concilier droit d’alerte et devoir de loyauté des membres du CSE envers l’entreprise ?
Les membres du CSE doivent trouver un équilibre entre leur rôle de protecteurs des droits des salariés et leur devoir de loyauté envers l’entreprise. Cela signifie parfois faire des compromis et chercher des solutions qui bénéficient à la fois aux employés et à l’entreprise.
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